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Consultation

Bâtiments du SEPTEN

Le bureau de recherche du SEPTEN (Electricité de France, Service Études et Projets Thermiques et Nucléaires) est décentralisé depuis 1984 à Villeurbanne, quartier du Tonkin. Les bâtiments qui l’accueillent sont conçus en collaboration par les agences Claude Parent et Gimbert-Vergely : ils offrent une conception innovante d’un espace de travail où priment les échanges et la communication.

Cour intérieure des bâtiments du SEPTEN, 1986, (ph. OVIDE)
Cour intérieure des bâtiments du SEPTEN, 1985 (ph. OVIDE)
Plan d'élévation de la façade nord, cours André Philip (cote AMV PC109/1982)

Auteur(s) : Sandrine Madjar, historienne de l'art

Le choix du Tonkin

Dans le cadre d’une politique nationale de décentralisation, Électricité de France décide, en 1981, de transférer en province l’un de ses services de recherche, le SEPTEN. Créé en 1968, il est implanté dans la tour de la Défense, à Paris, depuis 1971. La région lyonnaise est choisie pour accueillir le bureau d’études, la vallée du Rhône étant un important carrefour de communication et un pôle nucléaire. Le quartier du Tonkin de Villeurbanne, qui est alors en pleine réorganisation urbaine, constitue pour l’entreprise un emplacement stratégique au sein d’un environnement en développement où se construisent bureaux et logements. La proximité de l’université scientifique Claude-Bernard Lyon 1, de l’INSA [1] et du REAL [2], est un argument supplémentaire dans la décision du choix d’implantation. Le terrain à aménager appartient à la SERL [3] et est délimité à l’est par l’avenue Antoine-Dutriévoz, au nord par le cours André-Philip inauguré en 1982, à l’ouest par la rue Général-Dayan, anciennement rue Charles-Lyonnet, et traversé au sud par la rue Jean-Novel.

 Une collaboration fructueuse

Le directeur adjoint du SEPTEN, M. Pierre Maerten, est nommé maître d’ouvrage pour conduire ce projet qui doit être réalisé en moins de trois ans. EDF souhaite une construction innovante et exemplaire, tant dans sa conception architecturale que dans son organisation spatiale, afin de faciliter la communication au sein de l’entreprise. Devant la complexité de la demande et le peu de temps imparti, la direction fait appel à la collaboration de deux importantes agences d’architecture.

L’architecte parisien Claude Parent[4], qui a déjà œuvré auprès d’EDF pour la réalisation de centrales nucléaires, est sollicité pour concevoir un immeuble avec les architectes urbanistes villeurbannais Gimbert et Vergely. Chaque agence conçoit une proposition architecturale qu’elle présente au maître d’ouvrage. Claude Parent présente un édifice cylindrique de huit étages qui s’organise autour d’un noyau comportant une rampe hélicoïdale, tandis que l’agence Gimbert-Vergely propose une construction carrée de quatre étages ouverte sur un patio central. Les deux conceptions sont mises en commun et les architectes s’accordent pour la création d’un immeuble carré organisé autour d’un patio couvert avec une circulation interne hélicoïdale.

Le permis de construire est déposé le 4 juin 1982 et le chantier est commencé la même année avec le concours d’entreprises régionales [5]. Livré dans les temps, en juin 1984, le SEPTEN qui ouvre officiellement ses portes le 23 juillet, est inauguré le 10 septembre 1984 en présence du maire de Villeurbanne Charles Hernu, du ministre d’état chargé du plan et de l’aménagement du territoire Gaston Defferre, du sénateur maire de Lyon Francisque Collomb, et du président d’EDF Marcel Boiteux.

Une architecture avant-gardiste

L’ensemble architectural de 15 500 m², pouvant accueillir 520 agents, se compose d’un bâtiment principal au nord et d’un bâtiment secondaire au sud, reliés par un immeuble-pont qui traverse la rue Jean-Novel à 4,30 m de hauteur.

Le bâtiment nord, dont l’entrée principale s’effectue au n° 12 - 14 de l’avenue Antoine-Dutriévoz, s’élève à près de 22 m de hauteur. Il présente un entresol, cinq étages et deux niveaux de sous-sol. Quatre blocs indépendants réalisés en béton armé composent la structure et sont reliés entre eux par d’imposantes façades rideaux [6] réalisées en verre et en aluminium. Ces brèches transparentes établissent la communication au sein du bâtiment depuis l’extérieur par trois entrées différentes. Le bâtiment est couvert par une toiture terrasse et une verrière imposante de 1 200 m². Elle s’étend sur toute la partie centrale du bâtiment et retombe verticalement pour former les quatre brèches séparant les unités du service. Des plaques de granit poli sont agrafées aux blocs en béton armé, dans lesquels s’encastrent des châssis carrés aux verres réfléchissants qui rythment la façade lisse. L’immeuble-pont, traité en mur-rideau réfléchissant, effectue la liaison avec le bâtiment sud de 18 m de hauteur qui reprend le volume et la trame du bâtiment principal.

La configuration intérieure de l’immeuble principal rompt avec l’apparente sobriété et régularité des élévations extérieures. Chaque bloc est décalé verticalement d’un quart de niveau, permettant d’instaurer une rampe hélicoïdale de 5% qui établit une liaison continue entre les quatre plateaux du bâtiment. L’ensemble s’organise autour d’un patio central couvert de 30 m. sur 27,50 m. qui révèle un jardin aménagé par le paysagiste lyonnais Jérôme Vital-Durand. Lieu d’accueil, d’échange et de rencontre, ce jardin tropical comprend près d’une centaine d’essences exotiques abritées par la verrière en forme de shed [7] faisant office de serre. Les courbes foisonnantes du bassin et des massifs en étage répondent à la sobriété rectiligne des façades extérieures ceinturées par d’imposants bacs à plantes carrés.

La construction du bâtiment du SEPTEN est également une véritable prouesse technique. Pôle technologique, l’ensemble est chauffé par cinq cent vingt pompes à chaleur branchées sur la nappe phréatique située à faible profondeur dans le quartier du Tonkin.

Une conception innovante

L’architecture du SEPTEN s’éloigne des procédés habituels des immeubles de bureaux cloisonnés. Les architectes conçoivent une architecture ouverte, fonctionnelle et de qualité afin de répondre à des besoins d’échanges. Ils mettent au point un espace de travail exemplaire qui privilégie la communication entre les agents. Les blocs organisés autour d’un patio central permettent une configuration efficace de l’espace et autorisent un éclairage naturel par de larges ouvertures. L’intégration d’une rampe inclinée au sein de ces ouvertures, confère une circulation fluide qui facilite les échanges entre les unités. Ce système de plans inclinés, cher à l’architecte Claude Parent dans sa réflexion sur la « fonction oblique » [8], permet de passer aisément d’un étage à l’autre, contrairement aux plans horizontaux et verticaux. La verrière et les murs-rideaux ont un rôle fondamental dans ce projet et participent à l’intégration de l’immeuble au sein du quartier, grâce à l’emploi du verre et à ses qualités de transparence entre intérieur et extérieur. Le principe des brèches, qui s’élargissent au rez-de-chaussée, ouvre l’architecture sur la ville et établit une continuité avec le tissu urbain. Cette « transparence urbaine » permet d’offrir un cadre de travail agréable aux équipes dont les bureaux donnent, soit sur l’extérieur, soit sur le patio, par des châssis ouvrants, bénéficiant au maximum d’un éclairage naturel.

L’édifice du SEPTEN est aujourd’hui une architecture majeure au sein du quartier du Tonkin, symbole de décentralisation et de modernité. Cette conception nouvelle de l’espace de travail constitue un modèle pour les grandes structures qui s’inspirent encore de ce schéma.

En 2017, le SEPTEN, à l’étroit dans un bâtiment devenu trop exigu, quittera Villeurbanne pour s’installer dans l’ancien site industriel de la Grande Halle situé à Gerland, dans le 7e arrondissement de Lyon.

 



 


Notes

[1] Institut National des Sciences Appliquées.

[2] Régionale d’Équipements Alpes.

[3] Société d’Équipement de la Région de Lyon en charge du réaménagement du quartier du Tonkin depuis 1963.

[4] Claude Parent a reçu en 1979 le Grand Prix National d’Architecture pour l’ensemble de son œuvre.

[5] PC109/1982 : Électricité de France SEPTEN, bureaux d’études (1982).

[6] La façade rideau, appelée aussi mur-rideau, est un principe de structure légère, généralement conçue en verre et en acier, n’ayant pas de rôle porteur.

[7] Shed : toiture d’un atelier industriel, en dents de scie,formée d’une succession de toits à deux versants de pente différente, le plus court étant généralement vitré

[8] Théorie élaborée en 1964 par l’architecte Claude Parent et l’urbaniste philosophe Paul Virilio qui préconisent de vivre sur des plans inclinés afin d’établir une fluidité de circulation au sein de l’architecture.


Bibliographie

 Beaufort (Jacques), L’architecture à Lyon : Tome II-Lyon et le grand Lyon des XIXe et XXe siècles, Saint-Julien-Molin-Molette, Jean-Pierre Huguet Éditeur, 2001, 308 p.

 Permezel (Bruno), Villeurbanne 27e ville de France : Histoire des rues histoire des noms, Lyon, Éditions BGA Permezel, 1994, 262 p. (cote AMV 2C15)

 Immeuble du SEPTEN à Villeurbanne : Électricité de France, Services Études et Projets Thermiques et Nucléaires, Lyon, Édition SEDIP, 1984, 36 p. (cote AMV 2C1106)

« SEPTEN : spécial 25 ans », L’Écho de la Serre et de l’Arc, 1994, n° 31, 28 p.


Sources

Archives municipales de Villeurbanne :

 4C612 : Coupures de presse : Entreprises villeurbannaises (1982-1989).

 Permis de construire n° 109/1982 : Électricité de France SEPTEN, bureaux d’études (1982).

 11W53 : Université Lyon-I sur le site de la Doua (1988) : texte de l’allocution d’inauguration de l’exposition sur le SEPTEN (2 décembre 1988).

260W08 : documentation d’urbanisme (1977-1983) : signature du contrat de localisation du service d’études et projets thermiques et nucléaires.

 Sources imprimées :

« Les entreprises et établissements du quartier Charpennes-Tonkin aujourd’hui : le SEPTEN », Échos Charpennes-Tonkin, mars 1987, n° 38, p. 9-10.

 « SEPTEN : le numéro 1 de la pensée nucléaire », Villeurbanne aujourd’hui, septembre 1984, n° 6, p. 16.

« Villeurbanne capitale de l’électro-nucléaire », Lyon-Matin, 1er septembre 1984.

 « Décentralisation : Gaston Defferre inaugure aujourd’hui le SEPTEN », Journal Rhône-Alpes, 8 septembre 1984.

 « EDF et la décentralisation : L’inauguration du SEPTEN aujourd’hui par Gaston Defferre », Lyon-Matin, 10 septembre 1984.

 « Inauguration du SEPTEN : un nouveau pôle de technologie avancée », Le Progrès, 11 septembre 1984.

 « L’exemple EDF… », Le Progrès, 11 septembre 1984.

 « SEPTEN : la décentralisation active », COURLY Informations, octobre 1984.

 « L’immeuble du SEPTEN à Villeurbanne », Le Moniteur, 13 juillet 1984.

 « Le jardin extraordinaire du SEPTEN », Le Progrès, 14 décembre 1984.

 « Quand le SEPTEN joue les maisons de verre », Le Progrès, 10 décembre 1988.


3 commentaires

  • françois, 28 septembre 2015 à 10h06Répondre
    Bonjour,
    Le SEPTEN symbole de modernité architecturale certes, mais aussi lieu de recherche sur l'énergie nucléaire et ses applications industrielles, en particulier la surgénération.
    Le Comité de quartier du Tonkin et des écologistes se sont employés pendant quelques années à faire connaître les finalités du SEPTEN.Un dossier argumenté est disponible aux Archives municipales de Villeurbanne: 28Z.
    Cordiales salutations
    François Ménétrier
  • Thomas, 1 décembre 2015 à 21h20Répondre
    J'ai eu le plaisir de passer deux années à travailler dans ce bâtiment et je garde un excellent souvenir de ce bâtiment, son agencement, ses différents lieux de travail et de vie... Cela créait une ambiance particulièrement agréable.
    Je me demande bien ce que deviendra « La Serre » une fois que le SEPTEN aura quitté les lieux.
  • electron libre, 31 mars 2018 à 0h44Répondre
    j'y suis brièvement intervenu en tant qu'entreprise extérieure (electronique de puissance) en 1988: un cadre de travail exceptionnel !

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