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Consultation

Parc naturel urbain de La Feyssine

Le parc naturel urbain de la Feyssine, situé entre le Rhône et le boulevard Laurent Bonnevay au nord de Villeurbanne, présente une riche biodiversité animale et végétale. Cet ancien champ de captage en eau potable est aujourd’hui le poumon vert de la Ville. Le parc de 45 hectares, conçu et aménagé entre 2000 et 2002, s’inscrit dans la continuité des grands parcs de la rive gauche du Rhône. Cet aménagement innovant témoigne des préoccupations écologiques et urbaines de la Ville au tournant du XXIe siècle.

Parc de la Feyssine : plan de masse des aménagements paysagers, 1/1000e avril 2000. (cote AMV 6Fi39).
Le diapason en herbe au printemps 2016 (ph. Majdar)
orchidée (ph. G. Michallet)
Rive du Rhône au parc de La Feyssine en 1998 (Ph. G. Michallet)
ancien puits filtrant au Parc de la Feyssine (ph. G. Michallet)

Auteur(s) : Sandrine Majdar, historienne

Un site naturel intimement lié au Rhône

Citée par les archives dès le XVIIe siècle dans le parcellaire de 1698, la Feyssine connaît un infléchissement majeur de son histoire en 1860, lorsque sont entrepris l’urbanisation de la rive gauche et l’aménagement du parc de la Tête d’Or[1]. Une digue est édifiée le long du Rhône, afin de protéger ces nouveaux quartiers des inondations. En deçà de la digue, le site de la Feyssine composé de bois, taillis, maisons individuelles et gravières[2] s’étend sur 60 hectares.

À partir de 1894, il se transforme en une zone de captage d’eau potable, la plus importante de l’agglomération. L’usine de traitement des eaux, actuel Transbordeur[3], se situe boulevard Stalingrad.

Au milieu des années 1930, des canaux en forme de diapason sont creusés pour stocker l’eau et réalimenter la nappe phréatique si nécessaire. L’exploitation ferme en 1976 suite à l’abaissement du niveau de la nappe[4]. L’abandon du lieu favorise le développement de nouveaux milieux naturels.

Des préoccupations environnementales et urbaines

À la fin des années 1980, le maire Charles Hernu porte un projet intitulé « Villa urbana » dans la continuité du projet de Cité internationale de Lyon. Ce projet, contesté, est interrompu par son décès brutal le 17 janvier 1990.

Dans le contexte d’application du Plan vert[5], défini en 1991, la municipalité de Gilbert Chabroux décide en 1992 le maintien du site de la Feyssine en espace vert[6] et fait travailler un groupe d’étude sur son devenir. En 1994, il est classé en zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF)[7].

Les prémices du projet dans les années 1990

En 1997, suite à étude et concertation, est établi un cahier des charges dont l’objectif est de concevoir un parc naturel urbain qui soit l’intermédiaire entre un parc fermé, réservé à des usages pédagogiques et de recherche, et un parc public[8]. Le 14 décembre 1998[9], le programme d’aménagement du parc naturel urbain est définitivement voté et approuvé en conseil municipal.

Le 15 novembre 1999, le conseil municipal choisit l’agence Ilex[10], fondée par le paysagiste Guerric Péré. Le projet d’aménagement retenu par la municipalité vise à conforter et renforcer les chemins existants permettant la parfaite cohabitation entre piétons et cyclistes, à valoriser les zones de boisement, l’ouverture de vues et de percées sur le Rhône et à mettre en valeur la richesse écologique du site.

L’aménagement du site de la Feyssine

Parallèlement à la conception du parc, le Grand Lyon entreprend le réaménagement du boulevard Laurent Bonnevay, déclassé en boulevard urbain, et l’aménagement d’une ligne de tramway.

Les travaux débutent à la fin de l’année 2000 dans le respect de l’environnement. De janvier à mars 2001, de vastes travaux de débroussaillage, d’élagage et d’abattage dans les sous-bois permettent d’offrir de la lumière et de l’air aux jeunes plants et de redonner une visibilité aux axes du parc[11].

Dès le mois d’avril 2001, débute la deuxième phase de travaux concernant le terrassement, le nivellement et les plantations. Les fossés de l’ancien diapason d’une profondeur de 8 à 10 m sont dégagés, remblayés jusqu’à mi-hauteur et enherbés pour constituer une clairière sur 1 km. Seule l’extrémité nord-ouest du diapason est remise en eau pour la création d’un bassin pédagogique de 200 m²[12].

De nombreuses essences d’arbres sont plantées en respectant les caractéristiques des ripisylves[13]. À la fin de l’année 2001, la peupleraie accueille 183 nouveaux peupliers grisards et trembles. Les parties boisées reçoivent près de 15 000 plants d’essences variées dont des érables, des aulnes, des cornouillers, des marronniers, des platanes, des saules, des frênes, des chênes, des prunus et des eucalyptus[14]. Des prairies distinctes sont aménagées, dont une prairie aux graminées, une prairie haute et une prairie aux orchidées. Des trouées sont réalisées dans la végétation du rivage afin d’offrir des points de vue sur le fleuve[15].

L’aménagement des axes de circulation du parc

Le parc de la Feyssine s’étend, d’est en ouest, sur une longueur d’environ 2500 m et sur une largeur variant de 150 à 700 m. Ses cinq entrées permettent de mieux relier le site à la Ville.

Deux axes d’aménagement sont définis : un premier nord-sud, qui permet de relier la Ville au fleuve, et un second ouest-est, qui assure le lien entre le parc de la Tête d’Or et celui de Miribel-Jonage. Trois circulations majeures traversent le parc d’est en ouest : la piste cyclable, le chemin de halage et la promenade hectométrique. Les tracés de la piste cyclable et du chemin de halage sont antérieurs à l’aménagement du parc. La promenade hectométrique[16], traversant les boisements et les prairies, est créée lors de la requalification du parc. Elle se prolonge, à l’est, par un sentier circulaire qui encercle la peupleraie et la prairie aux orchidées.

À l’automne 2001 est installée une passerelle aérienne de 200 m formée de deux tronçons qui traversent le parc du sud au nord. Seul élément construit, elle permet de surplomber le diapason en herbe, à différentes hauteurs, jusqu’à 6 m du sol[17]. Les matériaux mis en œuvre sont simples, pour s’intégrer parfaitement au paysage et pallier les risques de crues. Près d’un an et demi après le début des travaux d’aménagement, le parc ouvre au public en 2002[18].

Un parc naturel urbain en mouvement

Cette conception de parc urbain du début du XXIe siècle met en valeur l’existant, sans pour autant tout redessiner. Le parc naturel est qualifié par les transformations du paysage au fil des saisons. Ce concept novateur basé sur la dynamique de l’évolution du milieu naturel permet de respecter les qualités du site.

Une équipe de quatre personnes veille à l’entretien du parc et a pour mission d’interférer au strict minimum afin de laisser la nature agir en l’accompagnant, plutôt qu’en la maîtrisant. La gestion du type « jardin en mouvement » s’applique à un espace où les espèces végétales peuvent se développer librement. L’utilisation d’engrais d’origine naturelle et le compostage des déchets permettent le respect de la biodiversité animale et végétale. Le projet d’ensemble porte sur une régénération progressive et spontanée de la végétation.

Une biodiversité floristique et faunistique

Le parc de la Feyssine comprend des espèces végétales et animales diversifiées. Il est conçu dans l’esprit d’une réserve naturelle offrant une mosaïque de clairières herbacées, de friches à hautes herbes sur remblais, de fourrés arbustifs et de groupements boisés aux essences variées. Trois zones majeures caractérisent la végétation du site : les berges naturelles du Rhône, la peupleraie et la prairie aux orchidées et les boisements du diapason.

Des espèces animales propres aux villes et aux parcs y cohabitent : castors, lapins, ragondins, fouines, surmulots et oiseaux migrateurs, hivernants et nicheurs, sont régulièrement observés. Le site héberge actuellement trois espèces protégées : les coléoptères Capricorne du chêne (Cerambyx cerdo) et Lucane cerf-volant (Lucanus cervus) et une fougère rare, la Langue de serpent (Ophioglossum vulgatum).

Le parc de la Feyssine aujourd’hui

Très fréquenté par les promeneurs, les joggeurs et les cyclistes, le parc sert également de support pédagogique pour des animations. Ces actions de sensibilisation à l’environnement ont lieu par le biais d’activités grand public. Le site obtient le label EVE (Espace Végétal Écologique) en 2008[19] qui récompense la Ville pour ses bonnes pratiques dans la gestion de cet espace vert.

Le parc de la Feyssine est complémentaire des autres grands parcs de l’agglomération qui ont tous leur spécificité. Le parc de la Tête d’Or est représentatif des méthodes du XIXe siècle avec la volonté de maîtriser la nature, le parc de Miribel-Jonage conserve son état sauvage et le parc de Gerland affirme sa vocation sportive.

Tout en présentant un aspect pédagogique sur la faune et la flore, le parc fait aujourd’hui mémoire de l’exploitation industrielle de la nappe phréatique, à l’époque où la Feyssine était le champ captant des eaux[20] de l’agglomération lyonnaise.

 




Notes

[1] Aménagé en 1864 par les frères Bühler.

[2] Les pierres de taille qui consolident les berges du Rhône par endroit seraient issues de la démolition de l’hôpital de la Charité, place Antonin Poncet, détruit en 1934.

[3] L’usine des eaux créée sur l’île du Grand Camp en 1908 et son captage, avec ceux de Saint-Clair, alimentent la ville de Lyon jusqu’en 1960. L’usine est réhabilitée en une salle de spectacle qui ouvre en janvier 1989.

[4] La zone de captage est déplacée à Crépieux-Charmy, sur l’île de Crépieux sur le Rhône qui fournit avec ses 114 puits et forages, 90% de l’eau produite dans le Grand Lyon. L’usine élévatoire de Croix-Luizet est mise en service en 1977.

[5] Projet global complémentaire du POS (Plan d’occupation des sols), il prévoit des plantations d’arbres le long des artères, l’aménagement de nouveaux espaces publics pour les années à venir et la valorisation de ceux existants. Il fait aujourd’hui partie du Plan municipal d’environnement.

[6] « La Feyssine en vert », Viva Villeurbanne, n°63, avril 1992, p. 4.

[7] « Parc urbain : La Feyssine retrouve ses racines fluviales », Lyon Figaro, 27 octobre 2001.

[8] 296W44 : La Feyssine, projet d’aménagement paysager (1993-2000).

[9] 352W111 : Parc naturel urbain de la Feyssine, phase d’avant-projet et réalisation des travaux d’aménagement (1999-2002).

[10] Agence de paysagistes et d’urbanistes basée à Lyon, associant une équipe de professionnels pluridisciplinaires en paysage, architecture et urbanisme. L’agence a notamment réalisé la place des Buers à Villeurbanne, le parc des oiseaux de Villars-les-Dombes et le parc de Miribel-Jonage.

[11] 352W111 : Parc naturel urbain de la Feyssine, phase d’avant-projet et réalisation des travaux d’aménagement (1999-2002).

[12] La remise en eau de cette partie du diapason n’a pas donné les résultats espérés, le lieu étant trop ombragé.

[13] Formes végétales qui se développent spontanément sur les rives d’un cours d’eau.

[14] « Du côté de… la Feyssine », Viva Villeurbanne, n°156, mai 2002, p. 8-9.

[15] Ces fenêtres pratiquées dans la ripisylve sont amenées à se refermer naturellement avec le temps tandis que d’autres seront ouvertes le long du fleuve pour offrir de nouvelles perspectives.

[16] Cheminement de 1400 m balisé tous les 100 m par des panneaux informatifs sur l’histoire de la Feyssine et sa biodiversité

[17] « Du côté de… la Feyssine », Viva Villeurbanne, n°156, mai 2002, p. 8-9.

[18] « Le Parc de la Feyssine », Paysage Actualités, avril 2004.

[19] Ce label est délivré par l’organisme ECOCERT.

[20] Au sein du parc de la Feyssine, 23 des 125 puits édifiés à partir de 1894, ont été conservés à titre de témoignage, ensablés pour éviter tout risque. Ils étaient destinés à puiser dans la nappe phréatique une eau filtrée par les dispositifs du "diapason".


Bibliographie

Grandin-Maurin (Catherine) et Lemahieu (Mireille) (dir.), Parcs, jardins et paysages du Rhône, CAUE du Rhône, Lyon, 2009, p. 216-219.

Webographie

Parc de la Feyssine-Villeurbanne, Ilex [paysage urbanisme], document en ligne, consulté le 2016-06-09,

<http://www.ilex-paysages.com/2657/realisations/parc-de-la-feyssine-%e2%80%a2-villeurbanne-69/#>.

 L’histoire du parc, 150 ans d’histoire ont façonné le parc de la Feyssine, La Feyssine parc naturel urbain, document en ligne, consulté le 2016-06-09,

< http://www.parc-feyssine.villeurbanne.fr/feyssine_villeurbanne_histoire.html#/home>.

 Decelle (Sandra), Production et sécurisation de la ressource en eau du Grand Lyon (1850-2009), 30-06-2009, Millénaire 3, document en ligne, consulté le 2016-06-20,

<http://www.millenaire3.com/content/download/3280/56026/version/1/file/production_eau_lyon_60709.pdf>.

 L’eau du Grand Lyon, Crépieux-Charmy un site de production d’exception, Grand Lyon communauté urbaine, document en ligne, consulté le 2016-06-20,

<http://www.grandlyon.com/fileadmin/user_upload/media/pdf/eau/20041223_gl_gp_eau.pdf>


Sources

Archives municipales de Villeurbanne :

1D 249 : commission municipale d’environnement et urbanisme : "Villeurbanne : la Feyssine", réflexions préalables à la définition des objectifs et enjeux municipaux: compte-rendu de réunion (20 février 1992) ; Commission générale : " La Feyssine" : procès-verbaux (29 avril 1992).

296W 44, 131 à 133 : La Feyssine, projet d’aménagement paysager : documents du cabinet du maire G. Chabroux (1989-2000).

352W111 : Phase d’avant-projet et réalisation des travaux d’aménagement, suivi du dossier par les maires Gilbert Chabroux et Jean-Paul Bret : correspondance, notes, articles de presse, notes manuscrites, plaquette « La Feyssine, parc naturel urbain, la nature en liberté » (s. d.), rapport du cabinet Ilex sur les réflexions de la phase AVP (s. d.), rapport du cabinet d’architectes-urbanistes Urban Transcript et de la paysagiste Agnès Deldon, 69 p. (octobre 1998), rapport de synthèse d’Emmanuelle Nicod sur le végétal dans la ville (décembre 2000).

Sources imprimées :

Ville de Villeurbanne Direction Paysages et Nature, Aménagement du Parc Naturel Urbain de la Feyssine : étude d’impact, mars 1999.

Ville de Villeurbanne, Direction Paysages et Nature : Eau-Feyssine, dossier pour Journées Européennes du Patrimoine, 2015.

Document figuré
Archives municipales de Villeurbanne

6Fi39 : Parc de la Feyssine : plan de masse des aménagements paysagers, 1/1000, 52 x 118 cm, avril 2000.

 

Magazine municipal : Viva Villeurbanne

« Dessine-moi la ville », n°58, septembre-octobre 1991, p. 22-23.

« La Feyssine en vert », n°63, avril 1992, p. 4-5.

« De nouveaux espaces publics », n°66, juillet 1992, p. 4-5.

« Mieux connaître la Feyssine », n°86, novembre 1994, p. 11.

« Demain, quelle Feyssine ? », n°87, décembre 1994-janvier 1995, p. 16-19.

« Trois paysagistes « planchent » sur la Feyssine », n°130, juillet-août 1999, p. 11.

« La Feyssine… ça avance ! », n°132, novembre 1999, p. 14.

« Ilex réalisera le Parc de la Feyssine », n° 133, décembre 1999, p. 16.

« Le parc de la Feyssine, curieux de nature », n°144, septembre-octobre 2000, p. 9.

« Grand nettoyage à la Feyssine », n°143, février 2001, p. 14.

« La Feyssine deuxième phase », n°146, mai 2001, p. 18.

« Des places où chacun a... sa place », n°150, novembre 2001, p. 12-13.

« La campagne en ville », n°151, décembre 2001, p. 5.

« Du côté de… la Feyssine », n°156, mai 2002, p. 8-9.

Articles de presse :

« La Feyssine sort de l’ombre », Le Progrès, 15 novembre 1999

« L’autre vision », Le Progrès, 15 novembre 1999.

« La Feyssine naturellement vôtre », Le Progrès, 23 novembre 1999.

« Un nouveau parc au bord du Rhône », Lyon Mag’, décembre 1999.

« Villeurbanne : La Feyssine, 40 hectares de la Doua au Rhône », Métro-Lyon, 4 février 2000.

« La Feyssine, de la digue à TEO », Le Progrès, 2 avril 2000.

« Parc urbain : La Feyssine retrouve ses racines fluviales », Lyon Figaro, 27 octobre 2001.

« À la découverte de la Feyssine », Le Progrès, 14 mai 2002.

« Un parc nouvelle génération », Le Progrès, 25 mai 2002.

 « La Feyssine : un brin de nature en pleine ville », Le lien horticole, n°13/414, mars 2004.

« Le Parc de la Feyssine », Paysage Actualités, avril 2004.

 


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