Hommage aux martyrs du charnier de la Doua

Extrait du "Bulletin Municipal Officiel de Villeurbanne", septembre 1945. Archives municipales de Villeurbanne / Le Rize.

Le charnier de la Doua a eu le triste privilège d’égaler en horreur ses devanciers. Il compte soixante-dix-huit corps défigurés, méconnaissables, exhumés avec des précautions infinies par les jeunes secouristes du frère Benoît, et auxquels Villeurbanne avec Lyon ont rendu, les samedi 29 et dimanche 30 septembre 1945, un fervent et suprême hommage.

La population, dès 17 heures, se pressait silencieuse et recueillie sur le parvis de l’Hôtel de Ville.

A 17h20 arrivèrent les treize camions de l’armée transportant les cercueils recouverts d’un drap tricolore.

La Municipalité, au grand complet, et le Comité de Libération accueillent les dépouilles des martyrs portées par les soldats du 4èmeZouaves.

Ensemble, unis dans la mort comme dans la bataille contre l’envahisseur exécré, ceux qui tombèrent sous les fusillades allemandes, dont l’écho sert encore le cœur des Villeurbannais, du Tonkin, des Charpennes, de la Feyssine, de Saint-Jean, reposent maintenant dans le grand hall transformé en chapelle ardente.

De magnifiques couronnes de fleurs naturelles, offertes par la Ville de Lyon, la Municipalité de Villeurbanne, le Ministère des  Prisonniers et Déportés, la CGT, décorent le hall.

A 19 heures, le Général Doyen, gouverneur militaire de Lyon, vient saluer les glorieux restes et s’incliner devant chaque famille. Une gerbe est déposée en son nom.

La foule est ensuite admise à défiler, tandis que s’organise la veillée funèbre qui durera jusqu’à l’aube et est assurée par le Comité de Libération, les services d’urgence de la Croix-Rouge, l’ARAC, les groupements de prisonniers et déportés, la CGT, les Sauveteurs de Villeurbanne et les organisations de la Résistance.

Au matin du 30 septembre, précédés par la musique de la Subdivision, les pompiers et les aviateurs de la base de Bron, accompagnés par la Municipalité, les membres du Comité de Libération, les familles, les organisations de la Résistance, les délégations des partis politiques et des anciens combattants, les cercueils, par le cours Emile-Zola, gagnent Lyon où doivent être à Bellecour célébrés les offices religieux et adressé par M. le Commissaire de la République un dernier adieu aux héros de la Liberté, arrachés à l’anonymat du charnier.