Témoignage de M. Bettand, premier patissier des Gratte-ciel

Extrait de "Quand les Villeurbannais racontent leur ville" n°11 : "1934-1995, Les Gratte-Ciel ont soixante ans", mai 1994.

Notre arrivée avenue Henri Barbusse a eu lieu fin mai 1934.

Mon père pâtissier arrivait de la place de Paris à Vaise. Avenue de l'Hôtel de Ville il y avait une grande boulangerie qui occupait une grande surface, mon père a acheté la moitié du local pour s'installer en pâtissier, car il n'était pas boulanger. L'affaire était séparée, la boulangerie tenue par Monsieur Muller qui était arrivé six mois avant nous.

IL y a à peu près huit ans mon fils a repris le commerce de boulangerie, Monsieur Bacco l'avait mis en vente donc nous sommes revenus à l'origine de 1934.

Je ne suis pas villeurbannais, je suis né place de Paris à Vaise en 1933.

Ce que mon père m'a raconté dans ses débuts villeurbannais : il n'y avait pas beaucoup de commerces ouverts, le café de la Poste à côté du central téléphonique et la Poste, une grande brasserie à l'angle de l'avenue de l'Hôtel de Ville et de la place de la Mairie, à côté Fantasio marchand de journaux, Marjolaine, un charcutier au bout de l'avenue sur le cours Emile Zola, c'était la charcuterie Morand, il y avait aussi Mourgeon qui à cette époque était une quincaillerie rue Michel Servet.

En 1934 tout était construit les commerces personne n'en voulait. Quand mon père est venu s'installer ses collègues l'ont traité de fou, ses amis pâtissiers lui disaient mais qu'est-ce que tu vas faire là-bas, tu ne vas pas travailler.

Les appartements étaient vides, une chose qui m'a marqué pendant très longtemps : les commerces étaient murés de briques rouges.

Petit à petit les gens sont venus mais ça a été très long. L'avenue a changé plusieurs fois de nom; au début c'était l'avenue de l'Hôtel de Ville, puis Henri Barbusse, redevenue avenue de l'Hôtel de Ville et aujourd'hui à nouveau Henri Barbusse.

Je me rappelle la fumée qui sortait de la grande cheminée de la rue Paul Verlaine qui était la chaufferie. On brûlait tout le ramassage des poubelles de Villeurbanne, il y avait des jours où les odeurs étaient désagréables, il y a eu des pétitions. Mais d'un autre côté nous avions le chauffage central et l'eau chaude sur l'évier, nous habitions juste en dessus du magasin.

Au départ des Gratte-Ciel c'était une curiosité, il y avait des cars entiers qui venaient de l'extérieur pour visiter cette ensemble de constructions.

Mon père le dimanche faisait des choux à la crème en quantité astronomique, les gens se promenaient dans l'avenue, nous étions le seul pâtissier ouvert le dimanche, les Gratte-Ciel c'était révolutionnaire !!!

Mon père m'a raconté l'inauguration, un monde fou, de partout, des journalistes de tous les pays, ceci a continué pendant très longtemps tous les samedis et dimanches.

Je me souviens des livraisons avec les chevaux, la glacière de Paris qui nous livrait des pains de glace, les limonadiers pour les boissons pour le café de la Poste et la brasserie.

J'ai été à l'école maternelle à Sainte-Thérèse, rue du 4 Août où il y avait le chanoine Boursier.

Je ne me suis pas marié à Villeurbanne, mon épouse était Lyonnaise du 7ème. Nous avons fait le repas dans un restaurant qui était tenu par des amis.

Mon père s'était réservé les desserts, moi-même ai fait la pièce montée, la veille de mon mariage et toute la mise en place tard le soir.

Par apport à mon enfance, les appartements des Gratte-Ciel se sont modifiés : D'abord une bonne chose, les ravalements, les appartements mis aux normes, salle d'eau, électricité, etc... ceci était indispensable.

Les Gratte-Ciel c'est un quartier, c'est une avenue la plus commerçante de notre ville, et des environs.

Je suis Villeurbannais avant tout, à part quelques escapades pour mes études et mon apprentissage, Paris, la Suisse.

Il existe toujours une petite rivalité entre Lyon et Villeurbanne, je vous cite un exemple, il y a quelques années le Tour de France est parti de l'Avenue Henri Barbusse à Villeurbanne, et bien on a cité le nom de Lyon au lieu de -notre cité. J'oubliais il y a autre chose qui a fait connaître Villeurbanne, le sport avec l'A.S.V.E.L., aujourd'hui les visites se sont atténuées, quoique en été on voit des touristes avec les appareils photos.

Aujourd'hui nous avons une nouvelle avenue, un nouvel éclairage, j'espère que la foule se déplacera à nouveau pour fêter les 60 ans de notre cité.